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Kadour Naïmi présente son
point de vue
El Watan, 13 avril 2013.
Je remercie la rédaction d'A & L de m'inviter à réagir à l'article qui répond à celui de Mohamed Kali.
En ce qui concerne mes déclarations publiques,
j'ai simplement tenu à rétablir la vérité sur la paternité de la
pièce Mohamed, prends ta valise, vérité qui a été occultée
et qui continue à l’être, comme dans l'article qui réplique à
celui de Mohamed Kali. Je démontrerai dans le détail des faits les
procédés et les motifs de cette occultation volontaire dans un
cadre plus adéquat que celui permis par un journal. Mon but est le
respect de la vérité historique et, comme tout un chacun, je
n'apprécie pas d’être volé de mon travail par d'autres à leur
profit. Si je ne suis intervenu sur ce problème qu'à mon retour au
pays, c'est parce que, pour des motifs personnels, qui seront exposés
en temps opportun, j'avais décidé de garder le silence pendant mes
quarante années d'exil sur tout ce qui concernait mon activité en
Algérie.
Pour en revenir à mes déclarations publiques,
j'ai alors constaté qu'agissant ainsi, j'ai touché à ce que
certains considèrent une «icône nationale intouchable», à
l'encontre de laquelle toute observation critique est inacceptable et
doit être sanctionnée. J'ai même été menacé verbalement
de «ne plus avoir de travail en Algérie si je touchais encore à
Kateb Yacine». Et cela s'est concrétisé très vite. Un directeur
de théâtre régional, ex-membre de l'ACT, troupe de Kateb Yacine,
m'avait proposé, devant témoin, de réaliser une pièce écrite par
moi, intitulée Le septième jour du septième mois, dans
l'établissement qu'il dirige. Le projet lui fut remis par moi en
présence du même témoin. Après mes déclarations dans El Watan du
31.07.2012, ce même directeur refusa de me rencontrer pour
concrétiser son engagement verbal. Le même témoin pourrait le
confirmer.
J'ai aussi des raisons de croire, sans disposer de
preuves indiscutables, que mes déclarations sur le même thème sont
également l'un des motifs pour lesquels ma pièce Alhanana, ya ouled
! (La tendresse, les enfants!), que j'ai réalisée au Festival
international du théâtre de Béjaïa, le 2 novembre 2012, n'a pas
été présentée jusqu'à ce jour dans les théâtres régionaux
afin que le public soit le seul juge de sa valeur. A qui veut se
faire sa propre opinion, je signale que j'ai filmé la représentation
de la pièce et réalisé un documentaire d'environ une heure sur la
genèse de la pièce, dont j'ai remis les DVD à la direction du
Théâtre régional de Béjaïa. Une présentation succincte de la
pièce se trouve sur Youtube
(https://www.youtube.com/watch?v=_5pF8WYcV-Q).
Au lecteur auquel
cela échappe ou à celui qui refuse de l'admettre, je souligne
encore une fois deux choses. D'une part, le conflit qui m'a porté à
mettre un terme à ma collaboration avec Kateb Yacine était d'ordre
strictement idéologique, à propos de l'orientation de la pièce
Mohamed, prends ta valise sur les causes réelles de l'émigration
algérienne en France. A travers les personnes de Kateb Yacine et la
mienne, ce furent principalement deux positions idéologiques qui
s'affrontèrent et se révélèrent incompatibles. L'histoire a
montré qui avait raison.
D'autre part, mes déclarations publiques
concernant la paternité de Mohamed, prends ta valise ne consistent
qu'à reconnaître à chacun sa part véritable dans l'écriture et
la mise en scène de cette création. A-t-on noté que je ne me suis
pas contenté de rappeler mon rôle dans la genèse de cette pièce,
mais que j'ai aussi évoqué, - et le premier, à ma connaissance -,
celui de Hrikess dans cette écriture ?
J'ajoute ceci : lors d'une
journée d'études au Crasc de l'université d'Oran, organisée par
le chercheur Amine Dellai, où je fus invité dernièrement, ce
problème fut évoqué. Mon exposé comme les débats qui suivirent
furent de niveau réellement scientifiques, évitant la vulgaire et
stérile personnalisation des thèmes et se concentrant sur les
questions d'art et d'idéologie, dans un seul but : éclaircir
objectivement une partie de l'histoire du théâtre algérien pour la
faire servir au théâtre algérien présent et futur.
Je rappelle qu'en retournant en Algérie en 2012,
j'ai publiquement déclaré que j'accepterais de retravailler au pays
à la seule condition que soit respecté le principe qui a toujours
été le mien, depuis la première pièce, Le cireur, que j'ai écrite
et réalisée comme lycéen à Tlemcen : disposer de mon entière
liberté artistique et «idéologique» (je préfère aujourd'hui la
nommer conception sociale), non parce que j'aurais la prétention de
penser que mon art et ma conception sociale soient les meilleurs ou
«géniaux», mais simplement parce qu'ils font partie de mes droits
de citoyen et d'artiste digne de ces deux noms. Je considère encore
cette liberté comme primordiale. Je lui dois de me regarder chaque
matin au miroir sans avoir honte de moi-même. Je suis évidemment
conscient que mes actes et propos sont susceptibles d'erreurs, mais
je sais également que ces actes et propos ont toujours été,
restent et demeureront guidés par un seul principe : l'art
authentique est en même temps un acte esthétique et éthique. Et,
en ce qui me concerne, l'éthique authentique est celle qui vise à
permettre aux êtres humains de conquérir leur droit au bonheur,
sans nuire à celui des autres. L'histoire de l'art universel le
démontre.
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